L’année 2025 marque le 80e anniversaire de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l’agression japonaise et de la Guerre mondiale antifasciste, ainsi que le 80e anniversaire de la création des Nations Unies. Quatre-vingts ans se sont écoulés, le brouillard de la guerre s’est depuis longtemps dissipé, mais l’ombre de la Seconde Guerre mondiale ne s’est jamais vraiment éloignée.
Un parterre commémoratif consacré au défilé célébrant le 80e anniversaire de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l’agression japonaise et de la Guerre mondiale antifasciste est inauguré à Beijing, le 16 août 2025.
Ces souvenirs traumatiques inscrits dans le patrimoine de la civilisation humaine, ces vérités historiques sans cesse malmenées par des visions erronées, et le spectre de l’extrémisme qui resurgit discrètement dans la réalité, nous rappellent constamment que se souvenir et défendre l’histoire de la Seconde Guerre mondiale n’est jamais un « passé », mais toujours un « présent en cours » qui concerne l’avenir de l’humanité.
En tant que guerre mondiale la plus vaste et la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité, la Seconde Guerre mondiale représente essentiellement une violation flagrante des limites fondamentales de la civilisation humaine par le fascisme et le militarisme. D’innombrables villes furent réduites en cendres, et des crimes contre l’humanité tels que le génocide, les expériences bactériologiques et les bombardements arbitraires sont devenus des cicatrices éternelles dans la mémoire collective de l’humanité.
Face à cela, l’alliance antifasciste mondiale, comprenant la Chine, l’URSS, les États-Unis, le Royaume-Uni et de nombreux peuples envahis, a résisté et riposté contre les invasions des pays fascistes comme l’Allemagne, l’Italie et le Japon. Il s’agissait d’une guerre de défense contre l’agression, visant à protéger la souveraineté nationale, l’indépendance des peuples et la justice humaine. Telle est la qualification historique de la Seconde Guerre mondiale.
Les dangers contemporains d’une vision erronée de l’histoire
Cependant, depuis huit décennies, les visions historiques erronées n’ont jamais vraiment disparu. Les forces d’extrême droite japonaises continuent de nier le massacre de Nanjing et de glorifier les guerres d’agression à l’étranger, présentant ces invasions comme une « libération de l’Asie ». Certains pays minimisent volontairement leur politique d’apaisement ou leur histoire coloniale pendant la Seconde Guerre mondiale, allant jusqu’à représenter le colonialisme comme une « diffusion de la civilisation » ou une coopération antifasciste, occultant ainsi l’oppression et le pillage des peuples colonisés. D’autres encore considèrent le front européen comme le seul théâtre déterminant de la guerre, ou mettent en avant la thèse de la « victoire décisive américaine », ce qui diminue l’importance de la longue et difficile résistance de la Chine contre le Japon et ignore les immenses sacrifices d’autres pays comme l’URSS.
Un Londonien sur Whitehall à l’occasion de la parade de la Journée de la Victoire en Europe, marquant les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, le 5 mai 2025
Plus grave encore, certains se servent du « nihilisme historique » en fragmentant les interprétations, en inventant des détails ou en niant les sources historiques fiables, pour remettre en question la légitimité de la victoire de la Seconde Guerre mondiale et celle de l’alliance antifasciste. Une telle attitude est une trahison de la vérité historique et un outrage aux victimes. Elle risque de provoquer une rupture dans la mémoire historique, de créer chez les jeunes générations une confusion sur les responsabilités de guerre et les standards de justice, et même de fournir un terreau idéologique au nouvel extrémisme et à l’hégémonisme.
Les contributions et sacrifices de la Chine gravement sous-estimés
En Chine, les quatorze années de guerre de résistance contre le Japon constituent une partie essentielle de la Guerre mondiale antifasciste, apportant une contribution majeure à la victoire mondiale tout en entraînant d’énormes sacrifices. Pourtant, l’apport historique de la Chine à cette victoire est gravement sous-estimé.
La vision traditionnelle européenne de la Seconde Guerre mondiale fixe sa période de 1939, avec l’invasion de la Pologne par l’Allemagne, jusqu’en 1945, avec la capitulation des puissances de l’Axe. Cette perspective ignore la dimension mondiale de la guerre antifasciste et minimise les conflits antérieurs à 1939 en dehors de l’Europe, comme l’invasion du Nord-Est de la Chine par le Japon en 1931 ou celle de l’Éthiopie par l’Italie en 1935, alors que les États-Unis n’entrent en guerre qu’après l’attaque de Pearl Harbor en 1941.
L’exposition photographique « Mémoire impérissable : Portraits de vétérans de la guerre de résistance » au Mémorial de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l’agression japonaise, près du pont Lugou, le 15 août 2025
Entre 1931 et 1941, la Chine a résisté à l’agression japonaise avec très peu de soutien occidental, retardant de manière déterminante l’avancée japonaise vers le nord et le sud grâce à une résilience stratégique exceptionnelle, posant ainsi les bases cruciales pour la victoire globale de la guerre antifasciste.
Au cours des dix années suivant 1931, jusqu’à 76 % des forces terrestres japonaises étaient mobilisées sur le front chinois. L’armée chinoise infligea aux envahisseurs japonais un total de 1,33 million de morts et de blessés, plongeant le Japon dans un véritable « bourbier militaire ». Les dépenses militaires japonaises passèrent de 450 millions de yens en 1931 à 5 milliards de yens en 1941, représentant 76 % du budget national, ce qui épuisa la quasi-totalité de ses ressources intérieures et contraignit le pays à adopter une politique de pillage visant à « financer la guerre par la guerre ». Cette politique renforça la résistance dans les territoires occupés et accéléra l’épuisement de sa machine de guerre.
Pendant toute la guerre de résistance, les pertes totales militaires et civiles chinoises dépassèrent 35 millions, soit plus d’un tiers du total mondial de la Seconde Guerre mondiale, faisant de la Chine l’un des pays les plus lourdement frappés du camp antifasciste. Ces faits, abondamment documentés, démontrent sans contestation que la Chine fut le principal théâtre oriental de la guerre antifasciste et un contributeur majeur à la victoire de la Seconde Guerre mondiale.
Défendre les acquis de la victoire de la Seconde Guerre mondiale
L’histoire de la Seconde Guerre mondiale, en tant que « mémoire collective » la plus douloureuse de la civilisation humaine, façonne directement les fondements contemporains de nos valeurs sur la justice, le bien et le mal, ainsi que la responsabilité.
Il y a 80 ans, l’Organisation des Nations Unies vit le jour pour éviter que les tragédies ne se répètent et pour permettre à l’humanité de progresser vers un futur plus rationnel et civilisé. Sa création constitue une étape clé dans le passage de la « loi de la jungle » vers un ordre fondé sur des règles.
L’ordre international, centré sur l’ONU et fondé sur les principes de la Charte des Nations Unies, représente le cadre de sécurité collective et de développement pacifique que l’humanité a construit à partir des ruines de la guerre. Sa naissance symbolise également la négation totale du fascisme et de l’agression expansionniste, le renversement de l’ancien ordre fondé sur le « droit du plus fort », et l’aspiration commune à une nouvelle civilisation fondée sur l’égalité, la justice et la coopération.
Cependant, 80 ans plus tard, la paix dans le monde reste fragile. Des conflits locaux surgissent de manière récurrente, l’hégémonisme et l’unilatéralisme refont surface, et certains tentent même de minimiser le rôle de l’ONU ou de déconstruire l’ordre international établi après la Seconde Guerre mondiale. Quand certains remettent en question le Tribunal de Tokyo en le qualifiant de
« vengeance des vainqueurs », quand d’autres nient la reconnaissance par la Déclaration du Caire de la souveraineté territoriale de la Chine, ou quand certains contournent le Conseil de sécurité de l’ONU pour lancer des interventions militaires, la réalité est que ces actes saper la légitimité historique de l’ordre de paix d’après-guerre, reconditionnent la logique ancienne du « droit du plus fort » en tant que « règles internationales » et préparent le terrain pour un retour à la « loi de la jungle ». Il est clair que l’ombre de la guerre n’a pas disparu, et que la défense des acquis de la Seconde Guerre mondiale reste une tâche lourde et essentielle.
La Chine, en tant que créatrice et défenseure de l’ordre d’après-guerre, continuera à s’inspirer de l’histoire et à s’appuyer sur la justice pour protéger fermement les acquis de la Seconde Guerre mondiale, guider l’ordre international vers un avenir plus équitable et raisonnable, et contribuer par sa sagesse et sa force au progrès de la paix et du développement pour l’humanité.
*MIAO LÜ est fondatrice et secrétaire générale du Centre pour la Gouvernance Globale (CGG)