Se souvenir de l'histoire et chérir la paix

Pour une vision juste de la Seconde Guerre mondiale
By MIAO LÜ* | Dialogue Chine-France | Updated: 2025-09-11 12:29:00

Lannée 2025 marque le 80e anniversaire de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre lagression japonaise et de la Guerre mondiale antifasciste, ainsi que le 80e anniversaire de la création des Nations Unies. Quatre-vingts ans se sont écoulés, le brouillard de la guerre sest depuis longtemps dissipé, mais lombre de la Seconde Guerre mondiale ne sest jamais vraiment éloignée. 

 

Un parterre commémoratif consacré au défilé célébrant le 80e anniversaire de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre lagression japonaise et de la Guerre mondiale antifasciste est inauguré à Beijing, le 16 août 2025. 

Ces souvenirs traumatiques inscrits dans le patrimoine de la civilisation humaine, ces vérités historiques sans cesse malmenées par des visions erronées, et le spectre de lextrémisme qui resurgit discrètement dans la réalité, nous rappellent constamment que se souvenir et défendre lhistoire de la Seconde Guerre mondiale nest jamais un « passé », mais toujours un « présent en cours » qui concerne lavenir de lhumanité. 

En tant que guerre mondiale la plus vaste et la plus meurtrière de lhistoire de lhumanité, la Seconde Guerre mondiale représente essentiellement une violation flagrante des limites fondamentales de la civilisation humaine par le fascisme et le militarisme. Dinnombrables villes furent réduites en cendres, et des crimes contre lhumanité tels que le génocide, les expériences bactériologiques et les bombardements arbitraires sont devenus des cicatrices éternelles dans la mémoire collective de lhumanité. 

Face à cela, lalliance antifasciste mondiale, comprenant la Chine, lURSS, les États-Unis, le Royaume-Uni et de nombreux peuples envahis, a résisté et riposté contre les invasions des pays fascistes comme lAllemagne, lItalie et le Japon. Il sagissait dune guerre de défense contre lagression, visant à protéger la souveraineté nationale, lindépendance des peuples et la justice humaine. Telle est la qualification historique de la Seconde Guerre mondiale. 

Les dangers contemporains dune vision erronée de lhistoire 

Cependant, depuis huit décennies, les visions historiques erronées nont jamais vraiment disparu. Les forces dextrême droite japonaises continuent de nier le massacre de Nanjing et de glorifier les guerres dagression à létranger, présentant ces invasions comme une « libération de lAsie ». Certains pays minimisent volontairement leur politique dapaisement ou leur histoire coloniale pendant la Seconde Guerre mondiale, allant jusquà représenter le colonialisme comme une « diffusion de la civilisation » ou une coopération antifasciste, occultant ainsi loppression et le pillage des peuples colonisés. Dautres encore considèrent le front européen comme le seul théâtre déterminant de la guerre, ou mettent en avant la thèse de la « victoire décisive américaine », ce qui diminue limportance de la longue et difficile résistance de la Chine contre le Japon et ignore les immenses sacrifices dautres pays comme lURSS. 

Un Londonien sur Whitehall à loccasion de la parade de la Journée de la Victoire en Europe, marquant les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, le 5 mai 2025 

Plus grave encore, certains se servent du « nihilisme historique » en fragmentant les interprétations, en inventant des détails ou en niant les sources historiques fiables, pour remettre en question la légitimité de la victoire de la Seconde Guerre mondiale et celle de lalliance antifasciste. Une telle attitude est une trahison de la vérité historique et un outrage aux victimes. Elle risque de provoquer une rupture dans la mémoire historique, de créer chez les jeunes générations une confusion sur les responsabilités de guerre et les standards de justice, et même de fournir un terreau idéologique au nouvel extrémisme et à lhégémonisme. 

Les contributions et sacrifices de la Chine gravement sous-estimés 

En Chine, les quatorze années de guerre de résistance contre le Japon constituent une partie essentielle de la Guerre mondiale antifasciste, apportant une contribution majeure à la victoire mondiale tout en entraînant dénormes sacrifices. Pourtant, lapport historique de la Chine à cette victoire est gravement sous-estimé. 

La vision traditionnelle européenne de la Seconde Guerre mondiale fixe sa période de 1939, avec linvasion de la Pologne par lAllemagne, jusquen 1945, avec la capitulation des puissances de lAxe. Cette perspective ignore la dimension mondiale de la guerre antifasciste et minimise les conflits antérieurs à 1939 en dehors de lEurope, comme linvasion du Nord-Est de la Chine par le Japon en 1931 ou celle de lÉthiopie par lItalie en 1935, alors que les États-Unis nentrent en guerre quaprès lattaque de Pearl Harbor en 1941. 

Lexposition photographique « Mémoire impérissable : Portraits de vétérans de la guerre de résistance » au Mémorial de la Guerre de résistance du peuple chinois contre lagression japonaise, près du pont Lugou, le 15 août 2025 

Entre 1931 et 1941, la Chine a résisté à lagression japonaise avec très peu de soutien occidental, retardant de manière déterminante lavancée japonaise vers le nord et le sud grâce à une résilience stratégique exceptionnelle, posant ainsi les bases cruciales pour la victoire globale de la guerre antifasciste. 

Au cours des dix années suivant 1931, jusquà 76 % des forces terrestres japonaises étaient mobilisées sur le front chinois. Larmée chinoise infligea aux envahisseurs japonais un total de 1,33 million de morts et de blessés, plongeant le Japon dans un véritable « bourbier militaire ». Les dépenses militaires japonaises passèrent de 450 millions de yens en 1931 à 5 milliards de yens en 1941, représentant 76 % du budget national, ce qui épuisa la quasi-totalité de ses ressources intérieures et contraignit le pays à adopter une politique de pillage visant à « financer la guerre par la guerre ». Cette politique renforça la résistance dans les territoires occupés et accéléra lépuisement de sa machine de guerre. 

Pendant toute la guerre de résistance, les pertes totales militaires et civiles chinoises dépassèrent 35 millions, soit plus dun tiers du total mondial de la Seconde Guerre mondiale, faisant de la Chine lun des pays les plus lourdement frappés du camp antifasciste. Ces faits, abondamment documentés, démontrent sans contestation que la Chine fut le principal théâtre oriental de la guerre antifasciste et un contributeur majeur à la victoire de la Seconde Guerre mondiale. 

Défendre les acquis de la victoire de la Seconde Guerre mondiale 

Lhistoire de la Seconde Guerre mondiale, en tant que « mémoire collective » la plus douloureuse de la civilisation humaine, façonne directement les fondements contemporains de nos valeurs sur la justice, le bien et le mal, ainsi que la responsabilité. 

Il y a 80 ans, lOrganisation des Nations Unies vit le jour pour éviter que les tragédies ne se répètent et pour permettre à lhumanité de progresser vers un futur plus rationnel et civilisé. Sa création constitue une étape clé dans le passage de la « loi de la jungle » vers un ordre fondé sur des règles. 

Lordre international, centré sur lONU et fondé sur les principes de la Charte des Nations Unies, représente le cadre de sécurité collective et de développement pacifique que lhumanité a construit à partir des ruines de la guerre. Sa naissance symbolise également la négation totale du fascisme et de lagression expansionniste, le renversement de lancien ordre fondé sur le « droit du plus fort », et laspiration commune à une nouvelle civilisation fondée sur légalité, la justice et la coopération. 

Cependant, 80 ans plus tard, la paix dans le monde reste fragile. Des conflits locaux surgissent de manière récurrente, lhégémonisme et lunilatéralisme refont surface, et certains tentent même de minimiser le rôle de lONU ou de déconstruire lordre international établi après la Seconde Guerre mondiale. Quand certains remettent en question le Tribunal de Tokyo en le qualifiant de 

« vengeance des vainqueurs », quand dautres nient la reconnaissance par la Déclaration du Caire de la souveraineté territoriale de la Chine, ou quand certains contournent le Conseil de sécurité de lONU pour lancer des interventions militaires, la réalité est que ces actes saper la légitimité historique de lordre de paix daprès-guerre, reconditionnent la logique ancienne du « droit du plus fort » en tant que « règles internationales » et préparent le terrain pour un retour à la « loi de la jungle ». Il est clair que lombre de la guerre na pas disparu, et que la défense des acquis de la Seconde Guerre mondiale reste une tâche lourde et essentielle. 

La Chine, en tant que créatrice et défenseure de lordre daprès-guerre, continuera à sinspirer de lhistoire et à sappuyer sur la justice pour protéger fermement les acquis de la Seconde Guerre mondiale, guider lordre international vers un avenir plus équitable et raisonnable, et contribuer par sa sagesse et sa force au progrès de la paix et du développement pour lhumanité.  

*MIAO LÜ est fondatrice et secrétaire générale du Centre pour la Gouvernance Globale (CGG) 

Numéro 24 avril-juin 2025
Se souvenir de l'histoire et chérir la paix
Le Jardin Bussière : entre hier et aujourd'hui
China Travel : immersion à Ya'an
Solidarité et résilience en Asie de l'Est pour la paix mondiale
Liens