Les États-Unis abritent certaines des universités les plus prestigieuses au monde. L’une des raisons de ce succès réside dans le fait qu’elles ont toujours ouvert leurs portes aux étudiants venus des quatre coins du globe. Bénéficier des connaissances des esprits les plus brillants tout en offrant des environnements d’apprentissage à la pointe de la technologie a toujours été le rêve de millions de jeunes gens.
Une file d’attente devant le bureau des visas de l’ambassade des États-Unis en Chine à Beijing, le 1er août 2022
Les chiffres sont éloquents car des étudiants du monde entier veulent étudier aux États-Unis. À titre d’exemple, prenons le nombre d’étudiants chinois ayant choisi de poursuivre leurs études en Amérique. Selon une estimation, près de 4 millions de Chinois ont été étudiants dans une université ou un collège américain entre 2012 et 2024.
Mais un examen plus attentif révèle un problème. Ces chiffres sont en baisse. On estimait à 372 000 le nombre d’étudiants chinois aux États-Unis pour l’année universitaire 2019-2020, un chiffre ayant chuté de près de 100 000 en seulement quatre ans. Peu importe que ces étudiants aient choisi de rester chez eux ou d’aller dans un autre pays. Ce qui compte, c’est qu’ils ont tourné le dos aux États-Unis. Et cela signifie que c’est ailleurs qu’ils réussiront, à court et long terme. Dans ce scénario, l’Amérique y perd.
Malheureusement, le gouvernement américain actuel semble prêt à voir encore plus d’étudiants chinois se détourner de l’Amérique. Dans une déclaration d’une arrogance remarquable, le Département d’État américain a annoncé qu’il chercherait « agressivement » à révoquer les visas des étudiants chinois actuellement présents aux États-Unis. Par extension, le gouvernement fédéral essaiera également de limiter le nombre de visas disponibles pour les futurs étudiants. La justification ? Les étudiants ayant des liens avec le Parti communiste chinois ou s’intéressant à des disciplines de pointe seraient invités à aller ailleurs.
En y réfléchissant bien, le gouvernement américain envoie ainsi le message que les étudiants devraient être punis pour leur affiliation politique ou leur domaine d’études. Autrement dit, ces étudiants sont considérés comme indésirables alors même qu’ils n’ont enfreint aucune loi ni manifesté aucune hostilité envers les États-Unis.
Lors du récent appel téléphonique entre le Président chinois Xi Jinping et le Président américain Donald Trump, la question des visas pour les étudiants chinois s’est posée. Le Président Trump aurait pu, et aurait dû, saisir l’occasion de reconnaître que cibler les étudiants chinois violait non seulement l’accord commercial temporaire conclu le mois précédent entre les deux nations, mais allait aussi à l’encontre de la tradition américaine d’accueil des chercheurs internationaux. Il aurait dû souligner les effets positifs des échanges entre les peuples.
Sans surprise, il ne l’a pas fait. Aucun progrès ne semble avoir été réalisé, ce qui signifie que les étudiants chinois restent dans l’incertitude. Quitter le pays pour quelque raison que ce soit pourrait entraîner un refus de réadmission. Rester dans leur établissement actuel aux États-Unis pourrait signifier recevoir un jour un appel leur demandant de partir immédiatement. Des années d’étude en classe et en laboratoire pourraient se terminer sans aucune certitude sur l’avenir.
Les étudiants chinois qui disent avoir peur ont bien raison. Comme s’ils participaient à une expérience psychologique, ils essaient de prendre la bonne décision sans rien pour les guider dans leur choix.
Ne tournons pas autour du pot. Ce que font les États-Unis est le reflet d’un pays qui agit par peur, non par force. Le président américain a lancé l’« Initiative Chine » durant son premier mandat, justifiant cette mesure en affirmant que les chercheurs d’origine chinoise œuvraient secrètement au développement de leur pays d’origine. Bien que les accusations d’espionnage se soient révélées sans fondement, le mal était fait. De nombreux chercheurs chinois ont choisi de rentrer chez eux ou de poursuivre leur travail dans un autre pays. De plus, une rhétorique enflammée insinuant que les Chinois vivant aux États-Unis n’étaient pas dignes de confiance a entraîné une vague d’attaques contre des Chinois ou des Asiatiques à travers le pays.
Maintenant, en 2025, le président américain semble prêt à compromettre le prestige mondial de tout le système de l’enseignement supérieur américain simplement pour affirmer qu’il considère la Chine comme une menace pour les intérêts américains. De la même manière, il met en péril un demi-siècle de coopération entre chercheurs américains et chinois, coopération qui a notamment permis aux chercheurs chinois d’être les partenaires de recherche les plus fréquents de leurs homologues américains. La Chine parle souvent de coopération « gagnant-gagnant ». Les nombreuses collaborations entre chercheurs américains et chinois en sont un exemple clair.
La Maison Blanche, quant à elle, semble prôner une non-coopération « perdant-perdant ». Les États-Unis perdent une première fois lorsqu’ils restreignent les possibilités pour les étudiants chinois d’étudier sur leur sol. Ils perdent une deuxième fois en cherchant à expulser les étudiants et chercheurs déjà présents dans le pays.
Il est impossible de quantifier précisément les dégâts causés par de telles politiques absurdes, mais il ne fait aucun doute que, dans les années à venir, de plus en plus d’étudiants et de chercheurs chinois rayeront les États-Unis de la liste des destinations souhaitées.
N’essayez pas de dire cela à l’administration américaine actuelle, qui semble déterminée à multiplier les erreurs dans la gestion de cette relation complexe entre les États-Unis et la Chine.
*ANTHONY MORETTI est professeur associé à l’École d’informatique, de sciences humaines et de sciences sociales de l’Université Robert Morris, aux États-Unis