Le COMAC C919, premier avion de ligne entièrement conçu et fabriqué en Chine, a effectué son vol inaugural de Shanghai à Beijing le 28 mai. Considéré comme un rival du Boeing 737, il marque ainsi un tournant majeur dans l’industrie aéronautique chinoise. 

Malgré cela, les critiques n’ont pas manqué de minimiser les réalisations de la Chine en soulignant que l’avion nécessitait toujours des composants fabriqués en Occident dans sa chaîne d’approvisionnement. Toutefois, il a rapidement été indiqué que d’autres avionneurs, dont Boeing et Airbus, disposent également des chaînes d’approvisionnement largement mondialisées et achètent des composants fabriqués dans les quatre coins du monde. 

Une membre du personnel montre aux enfants le cockpit du simulateur de vulgarisation scientifique C919 lors de la Journée internationale des enfants à Tianjin, 1er juin 2023. 

En fait, ces critiques passent à côté de l’essentiel. Si les composants de l’iPhone sont principalement fabriqués en Chine, cela signifie-t-il qu’Apple est une entreprise chinoise ? Le fait que la Chine a produit de manière indépendante un modèle d’avion commercial ayant la capacité de rivaliser avec les géants occidentaux démontre bien la montée en gamme de la fabrication chinoise. La Chine ne se contente plus d’assembler des pièces et composantes, elle fabrique ses propres produits de pointe. 

Si le C919 dispose de chaînes d’approvisionnement mondialisées tout comme d’autres constructeurs aéronautiques, c’est bien une démonstration de ce qui est décrit comme une coopération gagnant-gagnant, et cela montre ce que les États-Unis pourraient perdre en tentant de mettre en place des politiques contraires. Les chaînes d’approvisionnement sont un mécanisme très complexe, qui peut couvrir de nombreux pays et créer des réseaux commerciaux mondiaux, intégrant la main-d’œuvre et des niches technologiques dans différents domaines pour réduire les coûts tout en augmentant l’efficacité de production. 

Sur ce point, le succès du C919 nous rappelle que les chaînes d’approvisionnement ont un caractère mondial qui devrait être maintenu. Pour beaucoup de fournisseurs européens et américains, ce succès symbolise l’opportunité croissante du marché chinois. Alors pourquoi le politiser ou le discréditer ? Cette réalité a remis en question l’idée maintes fois défendue par les États-Unis depuis l’administration Trump, selon laquelle le commerce devrait être décrit comme un jeu à somme nulle. Autrement dit, l’idée que certains pays « gagnent » sur le dos des autres. Cela a conduit à une compréhension erronée selon laquelle le commerce avec la Chine se fait au détriment des États-Unis, ce qui a suscité des politiques radicales et contre-productives. 

Ce faisant, les États-Unis ont cherché à géopolitiser par force les chaînes d’approvisionnement mondiales, en faisant de sa domination politique une priorité sans tenir compte de l’efficacité du marché. Dans de nombreux secteurs, dont les semi-conducteurs et les panneaux solaires, cela a causé aux entreprises américaines des conséquences désastreuses. Les États-Unis cherchent activement à faire reculer la mondialisation en faveur des objectifs politiquement orientés, tout en incitant de petits groupes tels que le Cadre économique indo-Pacifique (IPEF) à faire de même. Rien de tout cela n’est économiquement bénéfique. 

Dans ce contexte, le COMAC C919 constitue un rare exemple de ce que les entreprises chinoises et occidentales peuvent créer ensemble pour contribuer à la croissance mondiale commune. Bien que les médias occidentaux insistent sur la « concurrence » avec l’avionneur américain Boeing, la Chine continuera à se développer et à se surpasser. 

Le succès du premier vol commercial du C919 marque un grand pas en avant pour l’industrie aéronautique chinoise. La poursuite du développement des avions de ligne chinois permettrait à la Chine de devenir l’un des fournisseurs d’avions civils ainsi que de produits et services connexes dans le monde. Cela lui permettrait aussi d’avoir plus d’occasions de coopérer avec d’autres pays dans le domaine technologique afin d’obtenir des avantages mutuels et des résultats gagnant-gagnant.

TOM FOWDY est analyste britannique en politique et relations internationales, diplômé des universités de Durham et d’Oxford